BASELIGHT 5.3 : L’ÉTALONNAGE DES PRODUCTIONS HAUT DE GAMME

Matthieu Straub, Spécialiste Workflow chez FilmLight, fait le point avec nous sur l’actualité de leur solution d’étalonnage Baselight, les nouveaux outils proposés dans la version 5.3 sortie en décembre et les retours d’expériences des utilisateurs de plus en plus nombreux.

– Quelle est la place de Baselight sur le marché français en ce début d’année 2021 ?

Matthieu Straub : Nous avons de plus en plus de clients, une vingtaine en France actuellement, et 6 ou 7 autres laboratoires avec qui je suis en discussion sérieuse. Silverway est le dernier laboratoire de post-production en date à avoir choisi notre solution. Aujourd’hui, par exemple presque toutes les sociétés qui post-produisent des longs-métrages ont un Baselight.

– Comment évolue ta mission de Spécialiste Workflow depuis ton arrivée chez FilmLight en 2019 ?

Ces derniers mois, je suis d’avantage ancré en France, même si en temps ordinaire je suis également tourné vers l’international. Nous avons la chance d’être un des pays les moins impactés par le Covid en termes de tournage et de post-production. Les échanges entre les chefs opérateurs et les étalonneurs sont très actifs en ce moment. J’ai renforcé les rencontres avec nos clients français dans ce sens. Pour nous, être en contact avec les créatifs, les techniciens des laboratoires mais aussi les DITs a toujours été une priorité, il est important de continuer.

– En quoi consistent les échanges auxquels tu assistes entre les chefs opérateurs et les étalonneurs ?

Ce que l’on voit se développer, c’est la recherche de look en amont du tournage. Le chef opérateur va faire des essais image sur un décor qui ressemble au décor du film. S’en suit une discussion entre le chef opérateur, l’étalonneur, le réalisateur pour préparer sur Baselight une intention de look. Cette intention sera appliquée dans la caméra, c’est presque systématique maintenant en long-métrage. Cela vient remédier à des situations parfois délicates qui ont pu se produire. Il arrive parfois en effet que le réalisateur qui a travaillé plusieurs mois en montage sur des images étalonnées en sortie de caméra, s’y soit habitué, et ait du mal à accepter des mois des plus tard, l’intention esthétique qui avait pourtant été convenue au début. Par exemple, il monte des plans dans la pénombre, et une fois les images densifiées par l’étalonnage, la pénombre disparaît. Cela peut produire une frustration. L’idée est donc pour l’équipe image d’avoir l’étalonnage le plus proche possible dès les rushes, en tout cas avec les intentions déjà bien marquées.

– Quels sont les outils qui ont été intégrés à la version 5.3 de Baselight sortie en décembre dernier ?

La 5.3 était très attendue. Nous y avons ajouté des éléments de recherche de looks, très utiles, et développé de nouveaux outils pour corriger les aberrations géométriques. Par exemple, sur la série Lupin produite par Netflix, qui a été étalonnée chez Mikros, cet outil de correction a été utilisé sur des images tournées avec des optiques anamorphiques sur lesquelles on voulait pouvoir contrôler ces aberrations. Nous avons également amélioré les outils de tracking, qui permettent désormais de rendre les points de track beaucoup plus fins. En ce qui concerne la couleur à proprement parler, un nouvel outil permet d’intégrer des Luts dans le Baselight et de les modifier en fonction de l’espace de couleur dans lequel on travaille, alors que ces Luts étaient au départ verrouillées dans l’espace colorimétrique dans lequel elles avaient été conçues. C’est un point fort pour les chef opérateurs qui ont leur propre Lut.

– Qu’est-ce qui a évolué sur la version 5.3 en termes de workflow ?

En termes de workflow, nous avons simplifié les rendus pour les grandes plateformes comme Netflix. Nous avons vraiment un outil de livrable Netflix, qui sort l’IMF déjà calibré, avec les réglages optimisés. Nous travaillons quotidiennement avec Netflix pour optimiser cela. Je cite Netflix car ils ont un cahier des charges très précis et ambitieux. En termes de codec, et donc de caméras, nous sommes toujours les précurseurs sur l’ensemble des caméras du marché. Nous prenons en charge par exemple le ProRes RAW.

– Le développement du logiciel résulte-t-il directement des remontées d’expériences des utilisateurs ?

C’est une combinaison d’échanges que nous avons avec les étalonneurs, et également de notre analyse en interne. Dès qu’il y a des remontées sur les outils qu’il pourrait manquer à Baselight, elles figurent sur une base de données commune, à laquelle toute l’équipe a accès. Cette base de données dessine la tendance vers laquelle nos équipes de développement vont aller. Ces équipes sont basées à Londres, qui est le siège social de la société, en Allemagne pour la partie spécifiquement dédiée à la couleur, et à Los Angeles pour la partie informatique, car nous avons un OS FilmLight dédié. Il y a bien sûr des échanges en interne sur la direction à privilégier : faut-il plutôt développer les outils pour les effets spéciaux ou les outils pour aller plus loin dans la gestion de la couleur ? Nous regardons de près les retours des utilisateurs. Mais la tendance est pour nous d’avoir des outils toujours plus créatifs. Nous avons actuellement une bonne partie de nos forces de développement qui travaillent sur des outils liés à l’intelligence artificielle.

– Dans quelle direction la politique de formation des utilisateurs évolue-t-elle chez FilmLight ? 

Pour accompagner les utilisateurs en complément de la formation aux lapins bleus, nous avons désormais une personne en charge de tutoriels vidéo sur des thèmes précis : les espaces de couleur, certains outils très particuliers… Ces tutoriels sont proposés en accès libre. Ces vidéos sont faites pour rassurer les étalonneurs et sont donc réellement complémentaires à une formation de 5 jours. C’est un plus, une introduction au logiciel, pour inciter les utilisateurs à se former. Nous mettons également à disposition et gratuitement, un logiciel dédié a la formation, Baselight Student, il est utilisable sur mac et propose tous les outils créatifs du Baselight sans limitation.

– Le profil des stagiaires est-il toujours le même ?

Beaucoup de stagiaires ont une expérience sur d’autres systèmes et souhaitent se plonger dans l’écosystème FilmLight. Certains ont déjà utilisé Baselight il y a quelques années, et veulent se rafraîchir la mémoire, les 5 jours sont très adaptés pour ce cadre là.

Les étalonneurs savent que s’ils veulent se diversifier et évoluer, que ce soit en long métrage ou en pub, il faut qu’à un moment donné, ils soient en capacité d’étalonner sur Baselight. La tendance se confirme. Et un étalonneur qui travaille sur Baselight se démarque vis à vis des laboratoires, car ils sont moins nombreux. 

– FilmLight encourage également les stagiaires à rester en lien avec la communauté d’utilisateurs, à la fois en proposant une salle pour pratiquer et en les invitant à des échanges ?

Dans notre bureau parisien, situé dans les même locaux qu’ARRI France, on a une petite salle d’étalonnage avec un écran HDR, et on propose aux étalonneurs qui ont un projet sur Baselight, de venir passer une journée sur la machine pour se remettre en main les pupitres. C’est valable pour les anciens stagiaires de la formation aux lapins bleus qui auraient un projet Baselight, parce que c’est ce qui se révèle le plus efficace, lorsqu’on travaille sur un film tout de suite après.

– Pour ce qui concerne les échanges au sein de la communauté, le contexte sanitaire a-t-il reporté certaines initiatives ?

Quand nous avons emménagé chez ARRI France, nous voulions créer une communauté d’étalonneurs, faire venir des chef-opérateurs et animer des discussions. Avec le Covid, nous avons dû suspendre pour le moment ce type d’événements et avons donc privilégié les webinaires. Le principe reste celui des échanges. Les stagiaires peuvent aussi avoir accès à cette communauté.

Par ailleurs, si un stagiaire a un projet et qu’il souhaite en discuter avec moi autour d’une table, je suis disponible pour cela. Le but est d’avoir autour de nous des gens convaincus par notre philosophie : offrir des outils créatifs dédiés aux étalonneurs, vraiment nourris par le retour des utilisateurs. C’est vraiment dans l’ADN de FilmLight de développer des outils, bien sûr par rapport à une roadmap établie à l’avance, mais d’abord et avant tout en fonction des demandes du terrain.